Les baleines noires de l’Atlantique Nord
Les baleines noires du Saint-Laurent appartiennent à la population de l’Atlantique Nord, présente surtout dans le Nord-Ouest. C’est une espèce migratoire qui fréquente les eaux côtières du Canada au printemps, en été et à l’automne en raison de la présence de leur nourriture de prédilection qu’elles y retrouvent en grande quantité (MPO, 2019). En hiver, les baleines noires migrent vers le sud, au large des côtes de la Floride et de la Géorgie qui sont d’importantes aires de mise bas.
Les baleines noires de l’Atlantique Nord mesurent de 13 à 17 m et peuvent vivre plus de 70 ans. Une femelle donne naissance à un baleineau toutes les deux à six ans (MPO, 2019), mais on observe cependant, d’une année à l’autre, de grandes variations dans le nombre de naissances ainsi que de femelles connues pour n’avoir jamais donné naissance (CWI, 2019).

Crédit photo: Korinne Leblanc, ROMM
Au Canada, deux zones ont été désignées comme habitat essentiel pour cette espèce: le Bassin Grand Manan dans la baie de Fundy ainsi que le Bassin de Roseway, au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse (MPO, 2019). Depuis quelques années, les biologistes observent un changement dans leur patron de distribution estival. En effet, elles semblent de plus en plus nombreuses à remonter plus haut dans les eaux du golfe du Saint-Laurent, dans la portion située au sud-est de la péninsule gaspésienne et du côté nord de l’île d’Anticosti.
Évaluée à 5 reprises (1980, 1985, 1990, 2003 et 2013) par le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), la population de baleines noires de l’Atlantique Nord s’est vue attribuer à chaque fois le statut « en voie de disparition ». Elle figure également sur la Liste des espèces en danger de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et du Endangered Species Act américain, ainsi que sur la Liste des espèces susceptibles d’être désignées menacées ou vulnérables au Québec en vertu de la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Sa population mondiale est aujourd’hui estimée à 411 individus (NARW Consortium, 2019).
On estime qu’entre 1991 et 2007, au Canada, 50% de la mortalité de cette espèce était causée par des collisions avec des bateaux. Par ailleurs, plus de 80% des individus présentent des cicatrices imputables aux prises accidentelles dans les engins de pêche (Baleines en direct, 2019).
Mesures de protection mises en place
Pendant l’été 2017, douze carcasses de baleines noires de l’Atlantique Nord ont été découvertes dans le golfe du Saint-Laurent et 5 autres le long des côtes états-uniennes, portant le total des individus retrouvés morts à 17.
Pour tout connaître du dossier, rendez-vous sur le site de Baleines en direct.
À la suite de ces événements Pêches et Océans Canada et Transports Canada ont imposé une mesure de gestion d’urgence qui consistait à réduire à 10 nœuds la vitesse de tous les navires de plus 20 mètres dans une vaste zone du golfe du Saint-Laurent. Devant ces faits tragiques et en réaction à cette mesure, l’industrie maritime s’est vite organisée avec la communauté scientifique et a demandé au gouvernement du Canada de mettre en place un groupe de travail pour trouver rapidement des solutions visant à réduire les risques de collision dans le golfe, tout en minimisant les impacts économiques associés à de telles mesures.
De 2017 à 2018, le travail concerté des membres de ce groupe a permis de raffiner les mesures de ralentissement des navires adoptées initialement afin de les rendre plus adéquates à la réalité économique des transporteurs maritimes.
C’est ainsi que d’avril à novembre 2018 deux zones, avec des mesures de gestion distinctes, ont été établies :
- Une zone statique à l’intérieur de laquelle la vitesse est limitée à 10 nœuds pour les navires de plus de 20 mètres.
- Une zone dite dynamique (à l’intérieure de la zone statique) au sein de laquelle les navires peuvent circuler à leur vitesse normale d’opération tant et aussi longtemps qu’une baleine noire n’y est pas observée ou que les conditions météorologiques ont pu permettre les vols d’observation.
Ces mesures se sont vraisemblablement avérées efficaces puisque aucune mortalité de baleine attribuable à une collision avec un navire n’a été observée dans les eaux canadiennes du golfe du Saint-Laurent en 2018 lorsque la limitation de vitesse était en vigueur.
Les mesures de gestion 2019

Source: Transports Canada
Du 28 avril au 15 novembre 2019 Transports Canada reconduit les mesures de gestion statique et dynamique. Les mesures de 2019 sont basées sur les plus récentes données scientifiques disponibles et sont le fruit d’un travail de collaboration continue entre le gouvernement, le milieu scientifique et l’industrie maritime.
- La zone statique de réduction obligatoire de la vitesse (identifiée en rose sur la carte ci-dessous) se situe dans la portion ouest du golfe du Saint-Laurent. On y impose en tout temps une limitation de la vitesse à 10 nœuds pour les navires de 20 mètres et plus. Un non-respect de la mesure peut se traduire par l’émission d’amendes pour non-conformité. Tous les autres navires de plus petite taille sont invités, sur une base volontaire, à respecter cette limitation de vitesse.
- La zone de gestion dynamique se sépare en quatre tronçons A, B, C et D à l’intérieur de la zone statique (en vert sur la carte).
Transports Canada, le ministère des Pêches et Océans Canada ainsi que l’agence américaine d’observation océanique et atmosphérique (NOAA), effectuent des vols de surveillance aérienne pour détecter, ou non, la présence de baleines dans les secteurs concernés par la mesure de réduction de vitesse.
Si une ou plusieurs baleines noires sont observées à l’intérieur ou à proximité [1]des corridors dynamiques, les navires de plus de 20 mètres sont dans l’obligation de réduire leur vitesse à 10 nœuds jusqu’à ce qu’un nouveau vol d’observation confirme l’absence de baleines noires.
Fréquence minimale des vols d’observation nécessaires pour pouvoir confirmer l’absence de baleines noires :
- 1 vol en 14 jours, du 28 avril au 11 mai
- 1 vol en 7 jours, du 12 mai au 1er novembre
- 1 vol en 14 jours, du 2 au 15 novembre.
Si cette fréquence d’observation minimale ne peut pas être respectée en raison de mauvaises conditions météorologiques, par exemple, une limitation de vitesse à 10 nœuds sera activée par précaution dans les zones de navigation concernées, jusqu’à ce qu’un vol d’observation ait pu être effectué pour confirmer l’absence de baleines noires.
Pêches et Océans Canada a également mis en place des mesures pour contribuer à la protection des baleines noires de l’Atlantique Nord telles que la mise en ligne d’une carte interactive des dernières observations des baleines noires réalisée en collaboration avec l’Université de Dalhousie, de même que des mesures de gestion des pêches.
Finalement, la Garde côtière canadienne diffuse des avis à la navigation pour avertir les navires de la présence, ou non, de baleines afin que ceux-ci adaptent leur vitesse le cas échéant.
Si une limitation de vitesse est activée, celle-ci sera en vigueur pendant 15 jours. Au cours de cette période de 15 jours, si aucune baleine noire n’est observée durant les vols de surveillance aérienne, la limitation de vitesse sera levée à la fin de la période.
S’il était impossible d’effectuer un vol de surveillance aérienne au cours d’une période de 7 jours, à cause de conditions météorologiques défavorables, par exemple, la limitation de vitesse restera en vigueur dans les zones où une baleine aura été vue auparavant jusqu’à ce qu’un autre vol de surveillance aérienne permette de confirmer l’absence de baleines noires.
Période de limitation de vitesse volontaire
De la fin de l’automne au début du printemps les conditions météorologiques ne sont moins favorables à la navigation et aux vols d’observation des baleines. Lors de cette période, Transports Canada demande à tous les navires de ralentir à 10 nœuds si :
- La présence de baleines noires est confirmée dans cette zone;
- Les conditions maritimes permettent aux navires de circuler en toute sécurité à cette vitesse.
Conformité et application de la loi
Transports Canada s’assure de la conformité des navires à cette mesure en examinant les données recueillies par la Garde côtière canadienne. Si un bâtiment semble avoir dépassé la limite de vitesse de dix nœuds des preuves supplémentaires peuvent être demandées au capitaine du navire.
Bien qu’aucune exemption ne soit accordée lors de l’évaluation du dossier, certains facteurs sont pris en compte tels que :
- Les décisions opérationnelles nécessaires à la sécurité du navire.
- Les conditions météorologiques et de navigation.
- Les décisions prises pour réagir aux urgences.
S’il est démontré que les navires ne respectaient pas les limitations de vitesse en vigueur, le propriétaire encourt une amende de 6 000 à 25 000 dollars.
Sources et références:
[1] Cette approche est également valable si une baleine est observée à l’intérieur d’une zone tampon de 2,5 milles marins adjacente aux secteurs A, B, C ou D ainsi que dans une zone à moins de 2,5 milles marins d’une frontière séparant deux secteurs. Dans ce dernier cas, une limitation de vitesse sera alors en vigueur dans le secteur adjacent.
Baleines en direct (avril 2018). La baleine noire
Ministère Pêches et Océans Canada (2018). Baleine noire de l’Atlantique Nord
Transports Canada (2019). Protéger les baleines noires de l’Atlantique Nord des collisions avec les navires dans le golfe du Saint-Laurent.