Le bruit sous-marins

Le milieu marin regorge de bruits à la fois d’origine naturelle (p. ex. la pluie, les orages, le craquement de la glace, les vagues, la vie marine) et à la fois d’origine humaine (navires commerciaux et bateaux récréatifs, forage, sonars, etc.).

De nombreuses espèces animales, dont les mammifères marins, utilisent les sons comme moyen de communication. Ils dépendent de ceux-ci  pour se diriger, s’alimenter, se reproduire et socialiser. La perturbation de cette communication peut entraîner des changements de comportement, une perte de l’audition, une augmentation du stress, des déplacements, des blessures et même la mort.

Le transport maritime commercial est l’une des principales sources de bruit sous-marin et une augmentation de ce type de bruit est à anticiper avec l’augmentation du trafic maritime liée à la croissance économique. La gamme de fréquences de sons utilisés par les mammifères marins est la même que celles émises par les navires. La cohabitation entre les mammifères marins et les navires est donc problématique, particulièrement dans les habitats traversés par des routes de navigation majeures, telles que l’estuaire du Saint-Laurent.

Bien que les impacts du bruit des navires sur la vie marine soient bien connus, de nombreuses incertitudes persistent sur les mécanismes de perturbation ainsi que sur les mesures de mitigation à adopter. Le nombre important de variables impliquées (type de bruit, espèce touchée, profondeur et température de l’eau, etc.) rend la recherche de solutions très complexe.

L’Organisation maritime internationale (OMI) a publié en 2014 des lignes directrices volontaires traitant des impacts négatifs des bruits sur la faune marine. Celles-ci décrivent surtout des méthodes techniques pour réduire les émissions sonores des navires commerciaux. Les lignes directrices n’ont cependant pas force de loi. Au Canada, il n’existe actuellement aucune réglementation qui encadre spécifiquement le bruit sous-marin provenant de la navigation. Toutefois, en tant qu’État signataire à l’OMI, le Canada s’intéresse de près à la problématique et a mené plusieurs projets de recherche au cours des dernières années.

Ainsi, à la fin 2012, Pêches et Océans Canada a initié un vaste projet visant à cartographier le bruit émanant des navires commerciaux dans le golfe du Saint-Laurent tout au long de l’année. Ces données, combinées à celles de la densité du trafic maritime dans la Saint-Laurent, ont permis de produire un atlas représentant les conditions acoustiques sous-marines des mammifères marins dans un emplacement à un moment donné. (Source : Pêches et Océans Canada, Projet À la recherche des bruits sous-marins)

En 2014, Transports Canada a également commandé une étude, réalisée par l’Alliance verte, pour mieux comprendre les bruits sous-marins d’origine anthropique dans le but de faire ressortir les besoins en recherche et de dresser une liste de recommandations et d’actions à prendre pour aborder l’enjeu en collaboration avec l’industrie maritime et les autres partenaires du milieu. (Source : Transports Canada, Rapport Comprendre les bruits sous-marins d’origine anthropique).

Du côté de l’industrie, les initiatives se sont également multipliées pour faire avancer la cause. L’enjeu des bruits sous-marins fait désormais partie du programme de l’Alliance verte et incite les participants à prendre des mesures concrètes afin de réduire les impacts de leurs opérations sur les mammifères marins. Le nouvel indicateur a été le fruit d’une collaboration entre la communauté scientifique (acousticien, architecte naval, chercheur universitaire), l’industrie maritime (armateur, port et terminal) et le secteur gouvernemental (Transports Canada et Pêches et Océans Canada).

Plusieurs armateurs mettent déjà en œuvre certaines mesures permettant de réduire le bruit des navires : opérer en dessous de la vitesse de cavitation et éviter les accélérations brusques, entretenir l’hélice pour réduire le bruit de cavitation, changer de route de navigation pour contourner des zones sensibles, insonoriser ou recourir à des équipements plus silencieux lors de la construction de nouveaux navires. Plusieurs ports canadiens, tels que le port de Vancouver (à travers son programme ECHO), sont également activement impliqués dans des projets de recherche dans le but de développer un jour des mesures de mitigation résultant en une diminution quantifiable du bruit des activités maritimes et de son impact sur la faune marine.

Dans le Saint-Laurent, plusieurs compagnies maritimes, telles que Canada Steamship Lines et Groupe Desgagnés, collaborent directement avec le Réseau d’Observation des Mammifères marins (ROMM) pour la collecte de données sur les espèces marines par leurs équipages dans le but de faire progresser la recherche scientifique sur le comportement des baleines. (Projet de collecte de données sur les mammifères marins adapté à l’industrie maritime – Rapport d’activité de la flotte de navires Desgagnés, saison 2016)

Actuellement, au Canada, le gouvernement, le milieu académique, l’industrie, les communautés autochtones et plusieurs ONG associent leurs efforts pour mieux comprendre les bruits sous-marins et leurs impacts sur la vie marine.
Le gouvernement du Canada a également annoncé un investissement de 1,5 milliards de dollars dans le développement de nouvelles mesures de protection et l’approfondissement des connaissances, dans le cadre de son Plan de protection des Océans dévoilé en novembre 2016.

 

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